Après plusieurs années comme ingénieur en santé publique, Maxime se reconvertit en 2022 dans les data sciences, une discipline qui concilie son intérêt pour le calcul, les statistiques et la programmation. Il rejoint le projet SENS fin 2023 en tant qu’ingénieur de recherche, avec pour mission d’adapter les outils technologiques, notamment d’intelligence artificielle, à l’éducation en santé. Prenons le temps, avec Maxime, d’en apprendre plus sur son rôle au sein du projet SENS.
Comment as-tu commencé à t’intéresser à l’intelligence artificielle ?
Je m’y suis mis au début de ma reconversion professionnelle. C’est à cette période qu’est sorti le premier modèle de ChatGPT et je l’ai utilisé pour faciliter mon apprentissage, notamment en Python. C'est plus simple et rapide de poser des questions à l'IA et de lui demander de générer le code qu’on souhaite, plutôt que de concevoir des lignes de code à partir de zéro. Cela modifie un peu les compétences requises, car il faut avoir une vue d’ensemble pour orienter l'outil vers les choix techniques que l’on souhaite, sans forcément maîtriser la syntaxe.
L’intelligence artificielle te sert-elle pour d’autres usages ?
Oui, au-delà du code informatique, je l’utilise pour travailler du texte, par exemple pour reformuler des phrases en anglais. Je reste néanmoins vigilant car les outils actuels manquent encore parfois d’idées originales : le texte généré est souvent basique, ce qui n’est pas l’idéal lorsque l’on réalise une tâche critique où l’on doit se démarquer. Cela peut être utile pour réécrire certaines parties, mais il faut garder un œil critique.
Une partie importante de ton travail consiste à générer des cas cliniques, peux-tu nous expliquer de quoi il s’agit ?
Les cas cliniques sont des textes qui décrivent des situations de patients, utiles pour former les professionnels de santé et les entraîner à poser un diagnostic. Les Large Language Models, comme ChatGPT, permettent déjà de générer des cas cliniques. Mon objectif est de créer une interface web pour que les enseignants et praticiens de l'Université et des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg puissent expérimenter la génération de cas cliniques à l'aide d'un prompt pré-formaté. Il sera possible d'évaluer et de partager les cas cliniques, ainsi que les prompts utilisés pour les générer, pour que les utilisateurs montent en compétences et s'approprient ces outils.
Quelles sont tes autres missions dans le cadre du projet SENS ?
Je sensibilise les étudiants aux enjeux de l’intelligence artificielle et je conçois des solutions techniques, comme la rédaction automatique de comptes rendus ou la génération de bibliographies. Je travaille également sur le projet SENS’IA, des ateliers destinés à faire connaître les nouveaux outils IA à la communauté universitaire. Nous réfléchissons ensemble à la manière d’adapter les cours et les évaluations à ces nouvelles technologies.
Qu’est-ce que l’intelligence artificielle pourrait apporter au domaine de la santé ?
La première amélioration serait de gagner du temps sur des tâches administratives comme répondre aux emails ou rédiger des comptes rendus. Il y a un potentiel énorme, mais il faut que les outils soient bien intégrés aux systèmes des hôpitaux et universités. L’IA facilitera le travail des professionnels de santé, mais le facteur humain restera essentiel dans la prise de décision.
Quels sont selon toi les risques associé à l’intelligence artificielle ?
Comme toutes les nouvelles technologies, leur potentiel peut être utilisé tant pour réaliser des choses "souhaitables" que leur contraire. Actuellement, je pense que le plus grand risque lié aux IA est leur capacité à simplifier la création et à rendre plus réaliste la production de faux contenus, que ce soit à des fins de désinformation ou d'escroquerie. Il est donc primordial que chacun s'intéresse à ces outils et à leurs possibilités afin de développer un esprit critique face aux informations auxquelles nous sommes exposés.
Dernière question : la santé numérique, c’est pour toi la panique ou le déclic ?
Pour moi, c'est plutôt un déclic. Je pense qu'il y a beaucoup à faire dans le numérique pour la santé, mais il est crucial de tenir compte de la fracture numérique existante et de veiller à ne pas dégrader la prise en charge des personnes qui n'auraient pas encore eu ce déclic.
Propos recueillis par Pauline B. | 18/10/2024